Nous avons testé l'auto évaluation du RGESN

La mise en ligne du site comnum.rennes.fr était l'occasion parfaite pour tester la nouvelle version du Référentiel général de l'éco-conception des services numériques (RGESN), paru en mai 2024.

Armés de notre bonne volonté, nous nous sommes donc attelés avec notre prestataire Noesya à ce travail d'auto-évaluation de bon matin. Deux heures plus tard, le résultat était là : 98% de conformité au RGESN. Pas mal ! Mais prenons le temps de rembobiner le film pour vous donner tous les détails de ce scénario qui nous a parfois donné du fil à retordre. 

Le résultat

100%

Nous avons obtenu la note de 100% sur 6 des 9 thèmes abordés dans le cadre de l'auto-évaluation RGESN :  

  1. Stratégie : notre anticipation des besoins et des utilisateurs, le fait que l'on fasse focus sur l'utilité du service ainsi que sur le suivi, nous a permis d'obtenir ce score.
  2. Spécifications : une rubrique technique un peu vaste, où nous répondons aux besoins tant logiciels que matériels, avec les notions de rétrocompatibilité, de reconditionnement ou d'optimisation de code source.
  3. Architecture : nous avons opté pour un site web statique, basé sur un noyau centralisé, avec une forte adaptabilité en fonction des besoins réels (codes sources, mobilisation des serveurs...).
  4. Expérience et interface utilisateur :  le 100% se justifie par des choix frugaux en matière de typologies de contenus et de fonctionnalités. Nous avons également fait le choix d'une approche éditoriale globale qui prend en compte l'échelle de sobriété des médias. 
  5. Frontend : Les technologies de cache, de compression et redimensionnement sont ajustées au besoin.
  6. Hébergement : bien que nous ayons obtenu 100% sur ce thème, nous nous interrogeons sur la logique de cette thématique qui repose sur le modèle des datacenter et sur un principe selon lequel ces entreprises développeraient une approche environnementale transparente. Or, notre choix d'un hébergement chez un particulier, membre du C.H.A.T.O.N.S nous positionne bien en amont de ce modèle.

    Ce n'est pas parce que notre score est de 100% sur ces 6 thématiques que nous devons considérer le travail terminé ! Nous conservons nos objectifs d'amélioration continue en veillant aux évolutions technologiques et en réfléchissant à des pistes d'optimisations.

    83%

    1. Contenus : nous développons une approche éditoriale sans aucune vidéo, l'audio est rarement mobilisé et systématiquement optimisé en amont. En revanche, Osuny ne propose pas, à date, de mécanique d'archivage automatique  et cette notion n'est pas encore intégrée dans notre politique de publication. Ce thème n'est donc pas entièrement validé, avec un score de 83%.

    Non applicable

    1. Backend : le site comnum.rennes.fr n'utilise aucun composant côté serveur et repose exclusivement sur une API qui consomme les données. 
    2. Algorithme : cette thématique fait référence à l'exploitation d'algorithmes d'apprentissage automatique ("IA") que nous n'utilisons naturellement pas ici. Nous interrogeons par ailleurs la notion d'optimisation, car l'IA repose de fait sur des modèles d'ultra-consommation des ressources, encore opaques et fortement destructeurs pour les écosystèmes.

    La démarche

    Pour rappel, le RGESN, référentiel général de l'éco-conception des services numériques, regroupe 78 critères relatifs à l'écoconception. Des fiches pratiques prévues pour chacun d'eux détaillent les attendus et vous accompagnent dans la démarche.  Ces critères sont rassemblés en 9 grands thèmes autour desquels s'organise le tableur (fichier xlsx), support principal de l'auto-évaluation : Stratégie, Spécifications, Architecture, UX-UI, Contenus, Front-end, Back-end, Hébergement et Algorithme. À première vue, le nombre d'onglets et la grande quantité de cellules peut paraître décourageante. Pas de panique ! L'approche didactique du support vous aidera à en venir à bout. Selon votre état d'avancement et votre connaissance du sujet, vous pourrez remplir toute ou partie du tableau. La partie gauche permet de générer votre déclaration de conformité au format PDF avec votre score en pourcentage. La partie droite est juste là pour accompagner, éventuellement, votre réflexion. 

    Un temps d'analyse relatif

    Nous concernant, nous avons mis un peu plus de deux heures à renseigner ce tableau. Nous formions une équipe de cinq personnes (2, côté prestataires et 3, côté Rennes Métropole). Une session plutôt rapide, mais proportionnelle à la complexité du projet numérique analysé (relativement simple à l'échelle du site comnum.rennes.fr), et l'équipe qui en a la charge. Si, par exemple, nous avions dû évaluer le site institutionnel de Rennes, ville et métropole, le temps nécessaire aurait été plus conséquent au regard du nombre de fonctionnalités et des spécificités techniques.  

    Un travail nécessairement collectif

    Nous avons fait le choix d'aborder collectivement ce référentiel et ce tableur, tant l'amplitude du sujet de l'éco-conception est vaste. Il ne nous semblait pas réaliste de traiter l'ensemble des sujets autrement qu'en groupe, en présence de toutes celles et ceux qui ont contribué au projet, pour plusieurs raisons :

    L'éco-conception couvre de nombreux domaines : technique, stratégique, éditorial, fonctionnel…  Délicat — pour ne pas dire impossible — de maîtriser seul·e toute l'étendue des questions du RGESN. L'idéal étant de constituer une équipe composée de l'ensemble des protagonistes :  chef·fe de projet, développeur·euse, gestionnaire de contenus, communicant·es… Ce sera, de surcroît, une très bonne occasion de mener un travail introspectif autour du projet numérique concerné. Chacun pourra alors partager son expérience et son expertise dans un élan constructif. Un bénéfice notoire, quel que soit le niveau de conformité obtenu.  

    Constituer ce collectif facilitera également les moments de "déchiffrage" du fichier RGESN, car certaines questions sont parfois complexes lorsqu'il ne s'agit pas de son propre domaine d'expertise.

    Notons, pour finir, que d'un point de vue pratico-pratique, aborder ce tableur en groupe vous permettra de jongler plus facilement entre le fichier d'auto-évaluation et les fiches pratiques des critères, sans avoir à faire des aller-retour incessants depuis un seul et unique écran. Un détail qui a son importance pour garder le cap sur une séance de deux heures. 

    Une approche itérative

    Le RGESN a le défaut de sa qualité : s'il traite le sujet de l'éco-conception de la manière la plus exhaustive possible, sa rigueur formelle le rend parfois  rigide...

    Pour chaque grand critère, il s'agit de répondre à un ensemble de questions et de sélectionner dans un menu déroulant le niveau de validité : En cours / Validé / Non validé / À évaluer. À vrai dire, si ce système est efficace lorsque l'on "rentre dans les cases", il est plus pénalisant lorsque vous abordez des cas particuliers. Prenons l'exemple concret de l'hébergement du site comnum.rennes.fr. Il est hébergé chez un particulier, membre du collectif des hébergeurs alternatifs C.H.A.T.O.N.S. Aucun datacenter, mais de vieux ordinateurs reconditionnés. Or, cette alternative n'est pas prévue dans les critères hébergement. Il semble pourtant, qu'en termes de réduction d'empreinte environnementale (notamment concernant la déperdition de chaleur ainsi que l'eau et l'énergie nécessaires au refroidissement d'un datacenter), cette solution aille dans le bon sens.

    Par ailleurs, reconnaissons la complexité de mise-en-œuvre de certains critères. Toutes les informations exigées ne sont pas aisées à obtenir. Le manque de transparence de certains hébergeurs, par exemple, ne permet pas de renseigner de manière systématique le PUE (Power usage effectiveness) ou le WUE (Water usage effectiveness) des entreprises.

    D'autre part, l'évaluation de certains critères repose sur des dispositifs dont les structures concernées ne disposent pas forcément. Une petite commune qui peine déjà à dégager un budget et du temps pour se mettre en conformité avec le RGAA(obligatoire), n'aura pas plus de ressources pour mener une Analyse de Cycle de Vie (ACV) ni mettre en place des indicateurs. Encore moins si cela concerne l'évaluation d'un unique service numérique, dont la production a probablement été sous-traitée. 

    "Même le plus long des voyages commence par un premier pas"

    Lao Tseu

    Rappelons que le RGESN ne constitue pas (encore) un cadre réglementaire et obligatoire. Il faut donc le voir comme ce qu'il est : non pas une contrainte, mais une opportunité d'interroger et d'améliorer l'éco-conception de nos services numériques. Cela nécessite de la patience et de la persévérance. Il ne s'agit pas de répondre à 100 % des critères du premier coup, mais plutôt de réfléchir à comment y parvenir un peu plus à chaque fois.

    C'est un fait ! Nous ne sommes pas tous égaux devant ce référentiel. L'échelle et la typologie de la structure influera forcément sur les moyens à disposition, de même que le niveau d'acculturation autour du sujet de l'éco-conception. Il est donc normal que nous ne soyons pas tous en capacité de répondre avec exhaustivité et de manière uniforme à cette auto-évaluation. Toutefois, il est intéressant, dans une démarche collective et itérative, de partager nos retours d'expérience et faciliter ainsi l'appropriation de ce référentiel devenu incontournable. Pour de nombreux projets numériques, le RGESN représente un cadre structurant et un langage commun entre les prestataires et les commanditaires.  

    L'auto-évaluation, un point de départ

    Le RGESN est outil nécessaire qui sensibilise les professionnels du numérique à l'éco-conception. Il permet d'impulser une démarche sans en constituer le point final. Au-delà de la création, l'usage, la diffusion et la fin de vie sont aussi à évaluer en termes d'impact environnemental. Rappelons qu'un projet numérique ne vit pas seul et se rapporte toujours à un contexte et des objectifs. Si la notion d'utilité est introduite comme un principe fondamental dans le RGESN, rien n'est précisé quant à la façon de le mesurer. Surveiller vos indicateurs d'audience vous donneront déjà une idée de la bonne utilité et/ou du bon usage de votre service numérique. Parce qu'un service numérique sans utilisateurs est un service logiquement plus impactant, et ce, même s'il a été éco-conçu !

    Au-delà du RGESN

    En réalisant cette auto-évaluation, nous nous sommes interrogés sur la notion d'utilité évoquée dans ce référentiel. En tant que service public, nous abordons l'éco-conception d'un point de vue technique certes, mais pas uniquement ! Nous y voyons également l'opportunité de rendre nos services plus efficients et plus inclusifs en introduisant la notion d'éco-socio-conception. C'est-à-dire concevoir des services numériques dont les impacts environnementaux sont réduits, mais dont les impacts sociaux sont positifs. Or, si la notion d'utilité fait bien référence à un besoin, elle ne considère pas la dimension sociale du service numérique. On parle de services et de ressources utiles sans en évaluer le juste besoin : équitable, inclusif et sans conditions. Une réflexion à mener dans le cadre d'une prochaine version ?